Bonjour Anne Marie,
Non, vous ne plombez rien du tout. C'est justement un espace de paroles ou chacun et chacune peut exprimer librement un trop plein ... ce n'est pas toujours possible à " l'extérieur". Raconter Salomé ... je pourrais y passer des heures, comme toute personne qui aime profondément son animal. Oui, ça me fait mal, parce que son départ est encore si proche, mais de toute manière, j'ai en permanence des images qui me trottent en tête. Je m'efforce d'estomper le souvenir de nos derniers câlins, de nos derniers instants ensemble; même si pour rien au monde je n'aurais voulu être ailleurs qu'à ses cotés. Elle mérite beaucoup mieux que mes souvenirs angoissés et d'une tristesse énorme, elle qui était l'incarnation de la joie, de la vie et de cet l'amour infini dont seuls les animaux sont capables.
Je rêvais d'un siamois, et la chatte siamoise d'une amie s'était laissée conter fleurette par le séducteur tigré du quartier. Cinq chatons étaient nés, certains très semblables à leur maman asiatique, les autres tigrés comme le papa. Salomé était en permanence avec un de ses frères tigré depuis sa naissance et je n'ai pas voulu les séparer. Partie dans l'idée de ramener un chaton, je suis rentrée à la maison avec deux: Salomé et Ramsès. Et je ne l'ai jamais regretté car ils se sont toujours bien entendus. Très vite, leurs caractères respectifs se sont affirmés. Bien que frère et sœur, ils sont totalement différents, aussi bien physiquement qu'au niveau du tempérament. Ramsès est très affectueux mais uniquement à ses heures : plutôt solitaire, il a des grands moments de tendresse éperdue et vient chercher sa ration de câlins avant de repartir s'installer dans son coin. Je suis certaine de son attachement : il y a quelques années, nous avons vécu une semaine d'angoisse parce qu'il avait disparu alors qu'il est très casanier. Il avait probablement sauté à l'arrière d'une voiture (il adore voyager) et nous l'avons vu rentrer une semaine plus tard, amaigri, les griffes et les coussinets usés, fou de joie de nous retrouver. J'ignore combien de km il a pu faire, mais une chose est sure, il était déterminé à nous retrouver. Il n'a jamais aimé être pris dans les bras et ne vient que rarement s'installer sur les genoux. Nous ne l'avons jamais forcé, c'est sa nature. De la même manière, il est le gentil patriarche des autres chats que nous avons recueillis par la suite mais ne dort jamais auprès d'un de ses congénères. La seule auprès de qui il aimait se reposer de temps en temps, c'était Salomé.
Salomé au contraire a toujours adoré être cajolée et prise dans les bras. Dès le départ, elle a été mon petit pot de colle chéri. Elle trottait en permanence derrière moi, me suivait dans la salle de bain, m'attendait devant la porte des toilettes. Alors que mes horaires de travail ne sont pas fixes, mes enfants savaient que j'allais rentrer dans le quart d'heure, parce que Salomé allait m'attendre devant la porte d'entrée pour m'accueillir. Elle a toujours été très douce et câline avec toute la famille, mais c'était "mon chat", dans le sens où elle m'avait choisie. Elle me vouait un amour, une confiance et une fidélité sans bornes. Très sensible, elle devinait mes moindres états d'âme et je ne compte pas le nombre de fois où elle est venue me réconforter. Je pouvais la trimbaler partout, du moment qu'elle était avec moi, elle était heureuse.
En 9 ans, il s'en est passé des choses : coups durs, deuils, maladies ... elle a toujours été là , attentive, douce, apaisante, ses grands yeux bleus plein d'amour. Et elle était bavarde, c'était vraiment drôle! Elle répondait quand on lui parlait et je connaissais la signification de toute sa gamme de miaulements. Elle tenait de grands discours en penchant la tête et nous faisait tous craquer.
En fait, Salomé était surprenante, parce qu'elle avait beaucoup de comportements humains. Les beaux comportements humains, je veux dire. Elle a accueilli et gentiment encadrés les autres chats que nous avons recueillis par la suite. Ils étaient craintifs au début : elle les rassurait, les lavait, les accompagnait dans la maison pour leur montrer où sont les bacs et les gamelles. Elle les guidait dans le jardin pour ne pas qu'ils se perdent. Quand j'étais absente ou occupée, elle s'installait près deux : j'ai des photos de Salomé allongée tendrement avec tous nos autres chats. Lorsque nous avons recueillis des lapins, elle s'en est aussi occupée.
En fait, ma petit Sally, si fine et menue, occupait une place énorme. Depuis 9 ans, elle était attentive, présente, tout le temps, partout, semant du bon, du doux, du chaud tout autour d'elle. C'était le bon génie de la maison et où que je pose les yeux, je croisais son regard tendre. Depuis trois mois, ma fidèle compagne était littéralement mon ange gardien : j'ai un gros soucis à la hanche et dois passer de longues heures allongée. Elle était en permanence couchée sur moi ou tout contre moi, jour et nuit. Elle s'endormait en ronronnant dans mon cou, s'enroulait délicatement sur ma hanche douloureuse en ne me quittant pas des yeux.
Son absence est donc très dure à supporter pour moi. Le manque que je ressens est une douleur intense, aussi bien morale que physique. Si je pouvais reprendre le travail ou ne serait ce que bouger d'avantage et sortir, je serais obligée de me concentrer sur d'autres choses, j'irais "ailleurs" où il est normal qu'elle ne soit pas et où son absence se ferait donc nettement moins sentir. Alors qu'à la maison, ce vide me rattrape et me blesse tout le temps. Et il est question de devoir sans doute m'opérer pour poser une prothèse de hanche. Je le prenais plutôt "bien", mais je me retrouve maintenant avec le moral dans les chaussettes.
Oui, ma famille est là , heureusement je suis comprise et entourée. Et mes autres minous sont là eux aussi. Je les aime, bien sur. Mais c'est différent. Il n'y a pas ce lien magique, cette osmose. Je sais que si vous connaissez le bonheur de vivre un lien très fort avec un félin, vous comprendrez ce que je veux dire. Ramsès, Diabolo, Nero, Plume, Zen et le dernier recueilli Lemon, sont d'avantage de "vrais" chats dans le sens: gentils, très tendres par moments et indépendants. Allant s'installer tantôt à l'étage, tantôt dans le jardin et venant se faire aussi câliner. A part Ramsès le solitaire, j'ai pris les autres "en cours de route", ils n'étaient pas tout petits. Et c'est sur, leur présence me met du baume au cœur. Certains d'entre eux sentent mon chagrin (ils en ressentent aussi je pense, je vois clairement certains chercher Sally) et se sont font même plus attentionnés par moments.
Mais que les heures d'immobilité sont longues sans ma Salomé, mon petit pot de colle chéri.
Merci d'avoir la patience de me lire et pardon si je réveille des blessures.
Amicalement Dominique |